mardi 12 juin 2012

Ok Corral

Depuis leurs maisons de l'île de Ré, les riches de droite, protégés par ce qu'il reste de leur bouclier fiscal, doivent suivre, non sans délectation, le soap opera qui se joue actuellement sur la rive d'en face, à La Rochelle. 
Les épisodes précédents sont bien connus et n'appellent qu'un bref résumé.

Ségolène Royal était à la recherche d'une circonscription où se présenter aux élections législatives, dans le but à peine secret de devenir présidente de l'Assemblée nationale. La 1ère circonscription des Charentes-maritime était disponible : le titulaire, socialiste, ne se représentait pas. Les règles internes au PS veulent que, dans ce cas là, la circonscription échoit à une femme. Ça tombe bien, Ségolène Royale en est une. 

Mais, les édiles locaux ne l'entendent pas de cette oreille. A leur tête, Olivier Falorni, premier fédéral du département, implanté localement de longue date. Il s'était résigné à ce que la députation lui échappe, puisque ça devait être une femme. Mais céder sa place à Ségolène Royal, pas question.

D'où une lutte fratricide et épique. Le PS a logiquement exclu Olivier Falorn et, soutenu Ségolène Royal. Ce qui n'a pas empêché Falorni de se prévaloir du soutien de François Hollande et de parvenir au second tour. La droite éliminée, le second tour opposera Ségolène Royal et Olivier Falorni. 

Dans ce cas de figure, il est habituel, à gauche comme à droite, que le deuxième se désiste. Cela donne une élection étrange, avec un seul candidat à la députation. Mais ça se fait. 
Pourtant,Olivier Falorni résiste. Et comment le lui reprocher ? Il sait bien qu'il aura avec lui une bonne partie des électeurs de droite qui y verront une bonne occasion de saborder le chemin semé de roses qui devait mener Ségolène Royal de La Rochelle au palais Bourbon. 
S'y ajoutent les électeurs de gauche qui ne peuvent pas supporter Ségolène Royal et, au vu du score d'Olivier Falorni au premier tour, il y en a un paquet. Bref, Olivier Falorni a de bonnes chances d'être élu député, de battre Ségolène Royal et de l'empêcher d'accéder à la présidence de l'assemblée nationale. J'imagine volontiers que beaucoup, rue de Solférino, sauront avoir le pardon facile à son égard.

Il y a de mauvaises raisons de s'opposer à la candidature de Ségolène Royal. En particuliers, l'idée qu'elle serait "parachutée". J'y reviendrai certainement dans un autre billet mais rien ne me paraît plus normal que le parachutage. Quand on est député, on est député de la Nation. Pas du village d'à côté. Peu importe qu'on vienne ou pas du village d'à côté. Il serait également malvenu de lui reprocher de candidater si outrageusement pour la présidence de l'assemblée nationale : c'est sain, en politique, d'avoir des ambitions et de les afficher. Accessoirement, Ségolène Royale est élue dans la région depuis 1988. Il y a des parachutages plus brutaux (Jack Lang, par exemple).

Il y a en revanche de bonnes raisons de s'opposer à cette candidature mais ces raisons sont indicibles à gauche, où l'on fait semblant que "seules les idées comptent". Les personnalités comptent aussi. Ségolène Royale passe pour une personnalité autoritaire, peu encline à la contradiction. Elle a une façon de faire de la politique et de se mettre en scène, en insistant sur sa dimension charismatique, qui m'irrite profondément. Et surtout, de sérieuses questions sur sa compétence se posent, des questions qu'on ne peut écarter d'un revers d'une main en s'exclamant : vous ne diriez pas cela si j'étais un homme !
Il est temps qu'on réhabilite une donnée essentielle du débat politique : les élections ne servent pas à choisir des idées, heureusement, mais des méthodes et des personnalités. Celles de Ségolène Royal sont, à tout le moins, fortement controversées, et elle ne fait pas mine de se remettre en question à ce sujet. 


Mais ce débat déjà bien animé et complexe vient d'être à nouveau ravivé par une dimension personnelle. La compagne du président de la République encourage Olivier Falorni. Les mots ont leur importance. Encourager n'est pas soutenir. Il est légitime qu'un homme politique en soutienne un autre dans le cadre d'une élection. Encourager, c'est autre chose. Cela peut relever d'une démarche plus personnelle, fondée sur des liens d'amitiés - ou d'inimitié ?
Bien évidemment, cela ne change pas grand chose : médiatiquement, Valérie Trierweiler, la nouvelle, prend clairement parti contre Ségolène Royal, l'ex. Le président de la République est confronté à des tensions entre son amitié pour Olivier Falorni et sa relation pour le moins complexe avec Ségolène Royal. 
Qu'il se refuse même à trancher signifie clairement que, lui aussi, souhaite la défaite de Ségolène Royal.

Un mot de lui, en effet, aurait suffit à ce qu'Olivier Falorni se retire. Il n'en a rien été. Et c'est normal. Ségolène Royal manque de la plus élémentaire décence politique : ex-compagne de l'actuel Président de la République, la vie politique doit lui être désormais fermée. Elle aurait du le comprendre d'elle-même, elle ne l'a pas compris. Il n'y a pas place pour le cumul des sentiments contradictoires, la confusion des pressions familiales et politiques. Il est regrettable que pour mettre fin à cette confusion, on en instaure une nouvelle, en permettant à Mme Trierweiller d'exprimer une opinion dissidente.


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